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‘Un Partenariat oriental qui profite à tous’ – un point de vue arménien

L’Autriche est devenue le 24e État à ratifier l’accord de partenariat global et renforcé (CEPA) avec l’Arménie en juillet. À ce jour, il reste encore trois États membres qui n’ont pas ratifié l’accord. Le 16 juillet, le Congrès des députés espagnols, la chambre basse du pouvoir législatif du pays, a ratifié l’accord UE-Arménie. Le document sera débattu pour ratification au Sénat dans un avenir proche. L’Italie est un autre pays qui doit achever les procédures internes de ratification, car le document a été ratifié par le Sénat l’année dernière. Le Portugal doit encore ratifier l’accord CEPA et le document sera bientôt examiné en séance plénière par le parlement du pays. Après l’achèvement du processus de ratification dans ces trois pays, l’accord entrera en vigueur.

En 2013, l’Arménie a dû renoncer à la perspective d’une relation d’association avec l’Union Européenne et a été contrainte de rejoindre l’Union douanière de l’Union eurasiatique. Ceci s’expliquant par la très forte dépendance du pays vis-à-vis de la Russie en termes de sécurité, de ressources énergétiques mais aussi du fait qu’un très grand nombre de travailleurs vivent en Russie, etc. Avant le sommet du Partenariat Oriental à Vilnius, l’Arménie était prête à signer l’accord d’association, mais les événements ukrainiens l’ont forcé à la prudence et à ne pas répéter le scénario Maïdan à Erevan. L’Arménie a décidé d’éviter les effusions de sang et d’adhérer à l’union douanière tout en développant les relations avec l’UE en arrière plan.

En 2017, dans le cadre de l’EaP, l’UE et l’Arménie ont signé l’accord sus-mentionné CEPA qui garantit un large champ de coopération. Le CEPA dispose d’une base juridique très avancée pour encadrer les relations. Certains le considèrent comme un accord d’association léger car il reprend tous les éléments de l’accord d’association à l’exception des dispositions qui pourraient être en contradiction avec les règles de l’Union douanière eurasiatique. Il implique également un rapprochement avec les acquis communautaires dans différents secteurs. Ainsi, l’EaP apparait comme est un gilet de sauvetage pour l’Arménie lui permettant de ne pas sombrer dans les abysses de la coopération eurasiatique. 

Le Partenariat oriental est l’un des cadres de coopération les plus fructueux entre l’UE et l’Arménie. Cela fait donc plus de 11 ans que cette initiative a été mise en œuvre en tant que cadre des relations entre l’Union européenne et ses 6 voisins – l’Arménie, l’Azerbaïdjan, le Bélarus, la Géorgie, la Moldavie et l’Ukraine. Au cours de ces 11 années, grâce à cette plate-forme unique, ces 6 pays ont une occasion exceptionnelle d’aller au-delà d’un simple partenariat et de développer des relations solides. Sur la base des erreurs et des réalisations passées, l’UE a adopté une nouvelle vision à l’égard des États du partenariat oriental. En dépit de l’épidémie de Covid-19, la Commission européenne a décidé d’adopter un document s’intitulant « Le partenariat oriental au-delà de 2020 : Renforcer la résilience – un partenariat oriental qui profite à tous« .

Le principe de base du document « Le partenariat oriental au-delà de 2020 » est donc la résilience, une notion tirée de la « Stratégie globale de l’UE« , adoptée en 2016. La résilience y est définie comme la capacité des États et des sociétés à se réformer, à résister et à se remettre des crises nationales et internationales, sur la base d’un niveau minimum de démocratie, d’État de droit et de développement durable. Ce concept a été accepté comme le fondement des relations avec les voisins. Cependant, le concept est aussi critiqué parce qu’il signale la fin du pouvoir normatif de l’Union au profit d’un pouvoir plus pragmatique. La résilience est une voie qui permet à l’UE de développer des relations avec ses voisins sans leur demander de renforcer leurs institutions démocratiques. Dans les années 2000, l’UE a été critiquée pour ses relations étroites avec des États autoritaires comme la Libye. En donnant la priorité à la résilience, l’UE a pu rationaliser l’établissement de relations commerciales étroites avec des voisins qui ne partageaient pas les valeurs européennes. Ainsi, l’inclusion du principe de résilience dans le document « Le Partenariat oriental au-delà de 2020 » démontre que les priorités pragmatiques de l’UE n’ont pas changé et qu’elles continueront à être les piliers de ses relations avec ses voisins.

Ce document général comporte cinq objectifs politiques à long terme, flexibles et liés entre eux :

  • Travailler ensemble pour des économies résilientes, durables et intégrées
  • Travailler ensemble pour des institutions responsables, l’État de droit et la sécurité
  • Travailler ensemble à la résilience de l’environnement et au changement climatique
  • Travailler ensemble à une transformation numérique concrète
  • Travailler ensemble pour des sociétés justes et inclusives

L’un des principaux concepts qui a été supprimé du document initial de la Politique européenne de Voisinage est la démocratie. L’UE a légèrement modifié le zénith de la coopération, passant de la promotion de la démocratie à l’exécution d’une démocratie qui fonctionne. Tous les objectifs proposés sont concrets, droits et réalisables. Toutefois, il existe un risque que les pays de l’EaP – qui disposent de démocraties très fragiles et se situant à mi-chemin entre autoritarisme et démocratie – ne fassent pas preuve d’une volonté majeure de transformation et de démocratisation.

En parallèle, l’UE gagne progressivement la bataille économique à mesure que les États de l’EaP diversifient leur économie. L’UE est le premier partenaire commercial de quatre pays partenaires – à savoir l’Azerbaïdjan, la Géorgie, la Moldavie et l’Ukraine – tandis que pour l’Arménie et le Bélarus, l’UE est le deuxième partenaire commercial. Ces relations commerciales ont également conduit à une diversification des exportations de marchandises des pays partenaires et à une meilleure intégration de ces derniers dans les chaînes de valeur mondiales. Le nombre d’entreprises qui exportent vers l’UE depuis la Géorgie a augmenté de 46 %, de 48 % pour la Moldavie et de 24 % pour l’Ukraine. Ces chiffres reflètent clairement les bénéfices mutuels du Partenariat oriental. Au cours de la première année de l’EaP, l’Arménie a augmenté ses exportations vers l’Europe de 60 %. Au total, en 10 ans, les exportations vers l’UE ont été multipliées par 2,5.

Chiffres tirés des données fournies par la Commission européenne accessibles ici.

Le Partenariat oriental a déjà eu des résultats tangibles dans la vie quotidienne des Arméniens. Par exemple, depuis 2009, l’Union européenne a prêté 500 millions d’euros à des entreprises arméniennes, soutenu 25 000 entreprises et créé 2 500 nouveaux emplois. Et bien sûr, l’impact de l’UE est indispensable dans le processus de démocratisation de l’Arménie, comme en témoigne la révolution de velours qui a secoué le paysage politique arménien en 2018. Il s’agissait d’une révolution sans précédent, non violente et pacifique, qui a entraîné une grande variété de changements dans le pays, façonnant l’avenir démocratique de l’Arménie.

L’UE est essentielle pour que l’Arménie ne soit pas influencée par l’adhésion au ‘club des pays autoritaires’ – l’Union Économique Eurasiatique – et afin d’assurer la continuité des réformes démocratiques. Citons également quelques objectifs spécifiques essentiels tels que l’importance de stimuler le développement des petites et moyennes entreprises, de parvenir à l’égalité des sexes, de réduire la bureaucratie inutile, d’offrir des possibilités d’éducation et de mobilité aux jeunes et d’améliorer la vie des citoyens ordinaires.


Les propos de l’auteure sont personnels et ne peuvent en aucun cas engager la responsabilité juridique de l’association Euro Créative.

Anna Barseghyan

Anna Barseghyan est une analyste politique spécialisée sur le Caucase du Sud et la Politique Européenne de Voisinage. Elle est titulaire de deux Masters, l’un acquis à l’Université d’État d’Erevan et l’autre au sein du Collège d’Europe à Varsovie, en Pologne. Depuis 2012, Anna travaille comme analyste politique dans différents groupes de réflexion et think-tanks. Ayant effectué un stage de recherche au sein du Parlement européen, elle contribue activement à un certain nombre de publications sur les relations UE-Arménie.

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2 commentaires sur “‘Un Partenariat oriental qui profite à tous’ – un point de vue arménien”

  1. Association with the EU is fine.

    However, Armenia must be careful that the EU does not try to force some of its less desirable policies onto Armenia.

    For example:

    – Unlimited immigration into Armenia.
    – Same-sex marriage and LGBTQ policies harmful to children and families.
    – Globalist, anti-national policies that seek to dilute ancient Armenian culture.

    Armenia and Artsakh (perhaps 3 million people total) remain under genocidal/existential threat today from Turkey (82 million) and Azerbaijan (10 million).

    There is little indication that the EU is aware of that or intends to take any action, such as helping to rein in Turkish and Azerbaijani threats and aggression.

    We are aware of Europe’s silence and inaction after the recent Azeri aggression, including Azerbaijan’s threat to target Armenia’s nuclear power plant.

    Apparently — and disgracefully — Europe has learned little from the Armenian Genocide.

    Armenians everywhere bitterly remember Europe’s many betrayals of Armenians after World War 1 and the Armenian Genocide. And yes, we are aware of Russian betrayals too.

    Europe’s betrayals and pro-Turkish/pro-Azerbaijani policies should and will limit Armenia’s participation in the EU and other European structures.

  2. Like any state, Armenia considers its security/survival Job 1. In Armenia’s case, security is not a nebulous concern: everyday Armenia faces threats to its survival by Turkey and Azerbaijan which have blockaded it. With Britain almost out of the EU, the two significant EU powers are Germany and France: the rest just make noise…condemn, regret, call for peace, shed crocodile tears. Germany–the godfather of Turkey and with four million Turks–will not come to Armenia’s defense if Armenia’s existence is threatened by Turkey and Azerbaijan. Despite its avowed friendship, France will also not go to war against Turkey on behalf of Armenia.
    If the EU wishes to assist Armenia, it can invest in Armenian industry, buy Armenian goods, and provide modern technology. Armenia’s population is three million while the combined Turkish and Azeri population is 93 million. Armenia needs sophisticated European armaments and robust EU political and diplomatic support against Turkbeijan aggression.

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