Depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie, la Tchéquie, la Slovaquie et la Hongrie réagissent très différemment dans leurs relations avec Kyiv, leur réarmement face à la menace russe, et leur attitude au sein de l’UE comme de l’OTAN. Analyse par Aurélien Duchêne, chargé d’études à Euro Créative.
Tchéquie
La Tchéquie peut incontestablement se prévaloir d’un leadership dans le soutien à l’Ukraine, ayant été la première à fournir à cette dernière des armes lourdes, et l’un des pays qui aura proportionnellement le plus soutenu l’Ukraine sur le plan militaire. Avant même l’invasion russe de 2022, le GRU avait été soupçonné d’être derrière l’explosion des entrepôts de munitions de Vrbětice, lesquels abritaient des munitions devant être vendues à l’Ukraine en 2014. Plus de 1 200 soldats ukrainiens – essentiellement des sous-officiers – avaient en outre été entraînés dans le pays par des instructeurs tchèques et britanniques. La Tchéquie avait fourni en quantité très limitées des munitions aux forces ukrainiennes dans les semaines précédant l’invasion russe de février 2022. Lorsque celle-ci advient, le ministère de la Défense tchèque fournit à ses homologues ukrainiens une liste d’armes pouvant être immédiatement transférées au pays attaqué – essentiellement des armes et munitions de petit calibre.
Prague devient la première capitale à livrer des armes lourdes à l’Ukraine, avec l’envoi de 38 chars T-72 dès avril 2022. Au total, le pays avait, à l’automne 2023, envoyé plus de 62 chars T-72M1 prélevés sur ses stocks militaires, vendu 27 chars appartenant à des stocks privés, et acheté pour l’Ukraine un nombre inconnu de T-72M1 bulgares. Dans le cadre de coopérations avec les Pays-Bas, le Danemark et les Etats-Unis, la Tchéquie entend également produire et livrer à l’Ukraine 105 chars T-72 Avenger, ce qui porterait le total des chars d’assaut livrés à Kiev à près de 200. A partir du printemps 2022 également, les Tchèques ont entamé la livraison de véhicules de combat d’infanterie tels que des BVP-1 (variant du BMP-1) et BVP-2, et a livré ou s’est engagée à livrer plus de 226 véhicules blindés.
La République tchèque avait aussi livré, à l’automne 2023, 128 mortiers et 13 obusiers automoteurs datant de l’ère soviétique (comme tous les autres équipements majeurs tchèques transférés à l’Ukraine), auxquels s’ajoutent divers types de pièces d’artillerie ou de lance-roquettes multiples, et des livraisons conséquentes de munitions. La Tchéquie est également le premier pays à envoyer à l’Ukraine des aéronefs, avec l’envoi de quatre hélicoptères de combat Mil Mi-24V ; elle s’est engagée à en livrer un total de 17 aux forces ukrainiennes. Elle a en outre livré plusieurs systèmes de défense aérienne datant de l’époque du Pacte de Varsovie.
En décembre 2023, la ministre de la Défense tchèque annonçait que son pays avait fourni l’équivalent de 6,2 milliards de couronnes, soit 0,25 milliard d’euros, de matériel militaire à l’Ukraine. Selon les statistiques (critiquées et critiquables) du Kiel Institute, l’aide livrée ou promise par Prague à l’Ukraine s’élèverait à 1,1 milliard. D’autres sources évoquent plusieurs centaines de millions d’euros, dont il faut déduire les aides budgétées en coopération avec d’autres pays ou ayant fait l’objet d’une aide financière de la part des Etats-Unis notamment. Le chiffre de 0,25 milliard d’euros annoncé fin 2023 reste le plus pertinent. Au même moment, le total des licences d’exportation d’armement vers l’Ukraine accordées par la Tchéquie s’élevait à 117 milliards de couronnes, soit 4,7 milliards d’euros1.
Qu’en est-il à présent de l’adaptation du réarmement tchèque en réaction à l’attaque russe de 2022 ? Dans les semaines précédant l’invasion de l’Ukraine, la République tchèque avait déjà préparé une mise à niveau de ses propres programmes d’armement. L’attaque du 24 février amène le pays à accélérer considérablement son réarmement, à en rehausser l’ambition, et à donner le feu vert à des programmes jusqu’ici incertains. La ministre de la Défense, Jana Černochová, ouvre immédiatement une revue des programmes en cours et des besoins des deux armées tchèques. En avril, le gouvernement tchèque approuve deux mesures phares : un plan pour accélérer les programmes prévus ou envisagés pour 2022-2024, à hauteur de 48 milliards de couronnes (près de 2 milliards d’euros aux taux de conversion de 2024), et un paquet législatif pour améliorer la réactivité du pays en cas de crise, militaire ou non, et stabiliser le financement de sa défense2.
L’enveloppe de 48 milliards de couronnes doit permettre de matérialiser rapidement des commandes portant notamment sur les munitions et pièces détachées, et d’accélérer des programmes d’acquisition majeurs (tels que les véhicules Pandur II et Titus), en allant au-delà des plans initiaux. Le paquet législatif inclut notamment la création d’un Fonds pour la défense nationale, au-delà de réformes visant à faciliter le fonctionnement de l’armée en situation d’urgence. Un an plus tard, le Parlement tchèque votera une loi contraignant le pays à consacrer au moins 2% de son PIB à ses dépenses militaires : là où ce niveau de dépenses, toujours non atteint en 2022, était un objectif qui passait souvent pour une fin en soi, il devient à la fois un plancher et un seuil irréversible, sous lequel le pays ne doit plus redescendre3.
En juillet 2022, le ministère de la Défense ouvre la voie à deux programmes majeurs : l’acquisition de véhicules blindés suédois CV 90, et surtout d’avions de combat américains F-354. Ces deux projets étaient depuis longtemps sur la table, mais n’avaient toujours pas reçu de feu vert du fait notamment de leur coût budgétaire. Malgré l’avertissement de 2014 et le nouveau consensus sur la nécessité d’un réarmement d’ampleur, la Tchéquie hésitait encore à s’engager dans un programme aussi coûteux que celui des F-35 : ces hésitations, d’autant plus compréhensibles pour un pays ne voyant jusqu’ici pas de réelle menace sur son sol en étant entouré d’alliés, peuvent une nouvelle fois inviter à relativiser l’image de leadership des pays d’Europe centrale et orientale. Les événements de 2022 les dissipent toutefois, et en confirmant des programmes aussi lourds, Prague s’engage vers un niveau de dépenses militaires conséquent au regard de la taille de l’économie tchèque.
Ce feu vert donné aux deux programmes se matérialise dès l’année suivante. Fin 2022, le ministère de la Défense signait un accord-cadre avec BAE Systems pour l’acquisition de véhicules de combat CV90 MkIV5. En 2023, ce sont 246 véhicules blindés CV90 de tous types que commande Prague, dont 172 véhicules de combat, pour environ 2 milliards d’euros6. Surtout, la République tchèque officialise en septembre de la même année la commande de 24 avions F-35 pour plus de 6 milliards d’euros, les appareils devant être livrés entre 2029 et 20357. Ce contrat, le plus coûteux de l’histoire militaire du pays, promet de faire entre l’armée de l’Air tchèque dans une nouvelle ère et de renforcer considérablement le poids de la Tchéquie dans la défense de l’Europe centrale et orientale.
Vu de Paris notamment, cette énième conquête à l’export de l’avion américain, véritable machine de guerre commerciale, constitue cependant un revers de plus pour les projets de souveraineté européenne et d’autonomie stratégique du continent. La déception est d’autant plus de mise du fait de l’accession à la présidence de la République, six mois plus tôt, du pro-européen Petr Pavel – déception pourtant prévisible au regard des positions atlantistes bien connues du nouveau président, et qui pour l’intéressé ne sont en rien incompatibles avec des orientations pro-européennes, y compris en matière de défense. Le premier ministre eurosceptique Petr Fiala invoque lui le pari de la sécurité, en choisissant « un système qui est en train de devenir une nouvelle norme et qui est acquis par la plupart des pays membres de l’OTAN8 ».
Prague se tourne cependant vers une solution européenne pour étoffer encore son artillerie, en commandant en septembre 2022 dix canons CAESAR français supplémentaires, portant la commande à 62 pièces. Ce choix est d’autant vu comme un succès politique pour Paris qu’il est motivé par les retours d’expérience de la guerre d’Ukraine, où les CAESAR livrés par la France ont montré d’excellentes performances9.
Fin 2022, alors que les débats sur les suites à donner à la modernisation des armées tchèques battaient leur plein, le Major General Karel Řehka, nouveau chef d’Etat-major tchèque, avait appelé dans un discours remarqué au « plus grand réarmement de l’histoire du pays10 », le budget de la défense étant alors déjà promis à augmenter de plus d’un quart pour l’année suivante, sur la route des 2% du PIB. Le pays s’est alors déjà engagé dans une revue de ses manques et besoins, et dans une révision de ses documents stratégiques à l’aune d’un réarmement plus important que celui prévu jusqu’alors. Il est prévu entre autres de porter les effectifs des forces d’active à 30 000 soldats, et ceux de la réserve à 10 00011.
Ce réarmement est loin d’être fini, car si Prague a déjà engagé des programmes majeurs qui vont considérablement renforcer ses forces – avions F-35 américains, CAESAR français, véhicules blindés CV90 suédois, d’autres programmes suivront. C’est notamment le cas dans le domaine des chars lourds. La Tchéquie étudie l’acquisition de chars allemands Leopard 2A8, c’est-à-dire la version la plus moderne12. La commande de 77 chars de ce type pourrait se faire dans le cadre d’une commande conjointe avec l’Allemagne auprès de sa propre industrie13. Cette réception de chars Leopard 2A8 viendrait s’ajouter à la livraison de 14 chars Leopard 2A4 remplaçant des chars tchèques livrés à l’Ukraine, dans le cadre d’un « Ringtausch » (« échange circulaire »)14.
Slovaquie
Si son soutien à Kiev est moins massif, en valeur comme en volume, que celui mis en œuvre par la Tchéquie, la Slovaquie a également fourni une aide conséquente à l’Ukraine voisine, d’autant plus au regard de sa population et de son budget militaire. La Slovaquie a notamment été le second pays à annoncer l’envoi d’avions de combat à l’Ukraine, immédiatement après la Pologne. Elle a ainsi envoyé à partir du printemps 2023 toute sa flotte de Mig-29 – 13 appareils – datant de l’ère soviétique, certains étant utilisés pour fournir des pièces détachées. Bratislava avait déjà envoyé en juin 2022 des hélicoptères de transport, et un système de défense aérienne S-300, qui devait être complété par deux systèmes Kub avant que cette décision ne soit suspendue du fait du changement de gouvernement. Outre une trentaine de véhicules blindés de combat d’infanterie BVP-1, la Slovaquie a aussi envoyé à l’Ukraine 24 obusiers automoteurs Zuzana-2s, achetés pour un tiers par l’Ukraine, et pour le reste par l’Allemagne, le Danemark et la Norvège : il s’agit là de l’armement lourd le plus moderne parmi ceux fournis par Bratislava à l’Ukraine, ces obusiers étant de conception et de fabrication post-soviétiques. La Slovaquie a également fourni des quantités non-négligeables de munitions de divers types.
La victoire aux élections d’octobre 2023 du populiste de gauche Robert Fico, revenu au pouvoir en s’alliant à l’extrême-droite, a cependant entraîné dès fin novembre un rejet du dernier paquet d’aide militaire à l’Ukraine par le nouveau gouvernement15, qui a annoncé arrêter la livraison d’armes au voisin ukrainien. Doublée de la crainte de voir M. Fico s’allier à M. Orban pour retarder, voire bloquer le financement de l’aide à l’Ukraine lors des sommets et conseils européens, le retour au pouvoir d’une coalition pro-russe a très sérieusement écorné la capacité du pays à contribuer au leadership de l’Europe centrale et orientale au sein de l’OTAN, voire de l’UE. Cette situation pourrait cependant se dégeler, le gouvernement slovaque ayant discrètement adapté sa législation pour permettre, dans les faits, à des entreprises publiques et privées slovaques de continuer de vendre des armes à l’Ukraine16. Si le soutien militaire de Bratislava reste donc très incertain, le pays a déjà livré selon le Kiel Institute pour près de 0,7 million d’euros à Kiev, son aide totale atteignant comme en République tchèque l’équivalent de 0,6% du PIB selon le même institut. Bien que financée en grande partie par des coopérations internationales, dont une inclusion dans le « Ringtausch » grâce auquel l’Allemagne remplace des armements d’époque soviétique livrés à Kiev par des armements modernes, l’aide militaire de la Slovaquie à l’Ukraine aura ainsi contribué à ce que le pays participe à la montée en puissance des pays d’Europe centrale et orientale dans l’OTAN.
L’invasion de l’Ukraine a également conduit Bratislava à aller plus loin dans ses programmes de réarmement, ou du moins à les accélérer. Dès les semaines qui suivent l’attaque russe du 24 février, la Slovaquie officialise le choix des véhicules blindés de combat finlandais Patria 8×8 pour moderniser ses forces terrestres17. Un contrat passé à l’été 2022 prévoit que l’industrie slovaque contribuera à la production des Patria, soulignant le souci de la Slovaquie d’entretenir son industrie de défense18. A la fin de l’année, le gouvernement slovaque passe également une commande significative de véhicules blindés de combat suédois CV90, qui permettront à l’armée de terre slovaque d’effectuer un saut qualitatif et de sortir de l’héritage du Pacte de Varsovie19. Le « Ringtausch » en coopération avec Berlin permet également à Bratislava de recevoir 15 chars allemands Leopard 2A4, en remplacement des blindés BMP-1 livrés à l’Ukraine20.
Au printemps 2022, la Slovaquie avait symboliquement franchi le seuil de 2% du PIB consacré à l’effort de défense21. Le pays avait affiché l’année suivante l’objectif de maintenir ses dépenses militaires à ce niveau ou au-dessus, et le retour au pouvoir de Robert Fico à la tête d’une coalition populiste prorusse n’a pour l’instant pas remis en cause cette intention, bien qu’il y ait un risque que le gouvernement puisse à l’avenir rogner sur les dépenses militaires pour financer des politiques électoralistes.
Hongrie
Le soutien militaire accordé par la Hongrie à l’Ukraine se résume uniquement à une participation – au demeurant minimale – du pays à l’entraînement de soldats ukrainiens, et à l’accueil de blessés. Budapest a refusé de livrer des armes, et a même menacé à plusieurs reprises de bloquer le financement de l’aide militaire européenne à Kiev. Depuis le début du conflit, le Premier ministre Viktor Orban s’est systématiquement ingénié à éterniser les négociations lors des conseils européens, et à y conditionner ses votes ou abstentions en faveur du financement de l’aide à l’Ukraine à des garanties politiques pour son exercice du pouvoir. En faisant de son pays le seul membre de l’Union européenne et de l’OTAN à n’avoir fourni aucune aide militaire matérielle à l’Ukraine, et en se distinguant par une politique visant à ralentir le soutien militaire européen à Kiev plutôt qu’à contribuer à son efficacité, Viktor Orban a ainsi durablement entamé toute prétention hongroise à un quelconque leadership militaire au sein de l’UE comme de l’OTAN, et plus largement la réputation même du pays au sein de ces deux organisations.
La Hongrie n’a pas non plus annoncé de nouvelles commandes majeures ni d’accélération de son réarmement en réaction à l’invasion de l’Ukraine. En février 2022, l’armée hongroise faisait état de son intérêt pour les lance-roquettes multiples américains HIMARS22. Une intention qui s’est précisée en début d’année suivante23. Mais ce contrat potentiel a été bloqué à Washington par un sénateur républicain qui entendait renforcer la pression sur la Hongrie pour qu’elle lève son veto à l’entrée de la Suède dans l’OTAN24, conduisant la Hongrie à renoncer à l’acquisition de HIMARS25. Le seul grand programme d’armement supplémentaire annoncé par la Hongrie depuis l’invasion de l’Ukraine est l’acquisition potentiel d’un système de défense aérienne israélien Iron Dome26, aucune commande n’ayant été annoncée pour l’heure.
La Hongrie semble afficher une forme d’indifférence aux conséquences de la guerre d’Ukraine dans la conduite de ses politiques de défense. Certes, d’autres pays, telle la France dont la loi de programmation militaire 2024-2030 allie continuité de programmes antérieurs et programmes nouveaux ou renforcés dans des domaines allant de l’espace aux fonds marins, ne calquent pas leurs orientations de défense pour les prochaines années sur le conflit ukrainien. Mais là où les pays en question citent la guerre d’Ukraine comme l’une des causes de leur réarmement et un élément majeur de leurs politiques de défense, la Hongrie se distingue en négligeant ouvertement les enseignements de de conflit. Elle se distingue d’autant plus en Europe centrale et orientale où ses voisins membres de l’UE et de l’OTAN intègrent tous à la fois le renforcement de la menace russe et les premiers retours d’expérience de la guerre d’Ukraine dans leurs programmes de réarmement ou de reconfiguration des effectifs.
Cependant, la Hongrie augmente significativement ses dépenses militaires. Celles-ci passent de 1,7% du PIB dans le budget 2022 à plus de 2,4% dans le budget 2023, l’un des niveaux les plus élevés de l’OTAN comme de l’UE en pourcentage de la richesse nationale, et trois fois plus que le niveau des dépenses hongroises de 2015 (0,7% du PIB). Le pays a ainsi porté son effort de défense au-delà du seuil de 2% que n’atteignent alors pas la majorité des membres de l’Alliance, et entend le maintenir à ce niveau. Le budget de la Défense hongrois devrait atteindre l’équivalent de 5 milliards de dollars en 2030, toujours au-dessus de 2% du produit intérieur brut27. Entre autres dépenses, Budapest compte acquérir de nouveaux systèmes de radar, en cohérence avec le projet d’acquisition de systèmes Iron Dome. Sur le plan budgétaire, la Hongrie est ainsi partie pour aller plus loin que ce que prévoyait « Zrínyi 2026 », bien qu’elle ne prévoie pas d’autres grands programmes d’armement supplémentaires pour l’heure – l’achat de HIMARS pouvant toutefois être débloqué par un feu vert de Budapest à l’entrée de la Suède dans l’OTAN, ou faire l’objet d’une solution de substitution.
Si la Hongrie a définitivement compromis sa capacité à contribuer à un nouveau leadership de l’Europe centrale et orientale dans l’OTAN du fait de son attitude face à la guerre d’Ukraine, le constat est plus ambivalent s’agissant de son réarmement. En effet, la Hongrie se classe désormais parmi les élèves modèles de la famille otanienne quant au niveau de ses dépenses militaires, ce qui est paradoxal au regard de sa contribution au soutien militaire de l’UE et de l’OTAN à l’Ukraine, de sa participation à la solidarité atlantique face à la menace russe, et plus largement de ses positions isolées au sein de l’Alliance. Le fait que la Hongrie se refuse toujours à livrer une quelconque aide militaire à l’Ukraine fait que ses stocks d’armement du Pacte de Varsovie restent largement intacts (hors retraits liés à la modernisation des forces), tout comme ses stocks de munitions occidentales en-dehors de celles utilisées pour l’entraînement. La forte hausse des dépenses militaires promet d’augmenter encore ces stocks. Sur le papier, la Hongrie devrait donc disposer d’une des meilleures armées d’Europe centrale et orientale pour les années à venir, alignant déjà par ailleurs davantage de chars, pièces d’artillerie ou hélicoptères modernes que ses voisins tchèque et slovaque. Cet avantage est cependant promis à s’amenuir rapidement du fait de l’ambition supérieur des autres pays précités en ce qui concerne les grands programmes d’armement, notamment dans les forces aériennes qui en Pologne et Tchéquie bénéficieront de commandes telles que des F-35.
La Hongrie affichera donc au cours de la décennie 2020 un outil de défense de qualité, modernisé et doté d’un niveau relativement élevé de dépenses militaires. Mais le pays est isolé, voire décrédibilisé au sein de l’OTAN où Budapest reste par ailleurs relativement peu intégrée dans l’effort de défense collective, malgré sa participation à certaines missions et son intégration dans les structures de commandement comme dans des dispositifs interalliés tels que la défense aérienne.
Aurélien Duchêne
Sources :
1 https://www.novinky.cz/clanek/domaci-licence-komercnich-dodavek-vojenskeho-materialu-dosahly-117-miliard-korun-40453930
2 https://www.defense-aerospace.com/czech-government-to-set-up-defense-fund-accelerate-procurement/
3 https://www.thedefensepost.com/2023/04/24/czech-republic-military-spending/
4 https://www.czdefence.com/article/the-minister-of-defence-has-cut-the-gordian-knot-the-7th-brigade-battalions-can-look-forward-to-cv90-the-air-force-to-f-35
5 https://www.baesystems.com/en/article/czech-republic-sweden-and-bae-systems-sign-mou-for-new-infantry-fighting-vehicles
6 https://www.baesystems.com/en/article/czech-republic-awards-bae-systems-contract-to-acquire-246-cv90s
7 https://www.euractiv.fr/section/defense/news/la-republique-tcheque-approuve-lachat-de-f-35/?_ga=2.216723990.1813152154.1705339212-118793912.1704277577
8 https://www.euractiv.fr/section/defense/news/la-republique-tcheque-approuve-lachat-de-f-35/?_ga=2.216723990.1813152154.1705339212-118793912.1704277577
9 https://www.forcesoperations.com/la-republique-tcheque-reprend-officiellement-du-caesar-8×8/
10 https://breakingdefense.com/2022/11/czech-army-leader-calls-for-biggest-rearmament-of-the-army-in-the-countrys-history/
11 https://www.czdefence.com/article/the-need-to-review-the-defence-of-the-czech-republic-is-both-legitimate-and-acute
12 https://defence-industry.eu/czech-republic-intends-to-purchase-leopard-2a8-tanks/
13 https://www.defensenews.com/global/europe/2023/12/20/czech-republic-wants-to-piggyback-on-german-leopard-2a8-tank-buy/
14 https://www.army.cz/en/ministry-of-defence/newsroom/news/leopard-2-_ringtausch_-agreement-signed-239596/
15 https://www.reuters.com/world/europe/new-slovak-government-rejects-final-military-aid-package-ukraine-2023-11-08/
16 https://www.politico.eu/article/in-post-election-reversal-slovakia-enables-weapons-exports-to-ukrainef-fico/
17 https://www.patriagroup.com/newsroom/news/2022/patria-8×8-vehicle-selected-by-slovakia
18 https://www.defensenews.com/global/europe/2022/08/31/slovakia-finland-ink-production-deal-for-76-patria-combat-vehicles/
19 https://www.janes.com/defence-news/news-detail/slovakia-orders-cv90s
20 https://e.dennikn.sk/minuta/2980877
21 https://spectator.sme.sk/c/22861494/slovakia-meets-nato-defence-spending-commitment-for-first-time.html
22 https://euro-sd.com/2023/05/articles/31349/hungarys-modernisation-plans/
23 https://dailynewshungary.com/hungary-might-consider-acquiring-himars-missile-systems/
24 https://www.washingtonpost.com/national-security/2023/06/14/hungary-sweden-nato-james-risch-himars/
25 https://defence.hu/news/the-ministry-of-defence-will-not-purchase-himars-missile-systems.html
26 https://missiledefenseadvocacy.org/missile-defense-news/hungary-eyes-iron-dome-as-new-air-defense-radars-are-on-the-way/
27 https://www.janes.com/defence-news/news-detail/hungary-increases-defence-allocation
Chargé d’études à Euro Créative, spécialiste des questions de défense et de sécurité internationale. Auteur de Russie : la prochaine surprise stratégique ? (2021, rééd. Librinova 2022) et de La Russie de Poutine contre l’Occident (Eyrolles, 2024).